Vive émotion pour la « fin du film » du couple Bellassai
Françoise et Joseph (Giuseppe) Bellassai ont tenu le Denner de Couvet durant plus de 13 ans. Mercredi, ils ont tourné une dernière fois la clé dans la serrure de leur commerce qui sera désormais géré par Naser Mohammd. Ceux qui habitent à côté du cinéma Colisée ont dû se résoudre, non sans peine, à vivre la fin du film qui les liait au quotidien des Vallonniers. Et comme souvent, à la fin de tout bon film, il y a eu un pic d’émotions et des yeux qui se sont égayés de larmes. Retour sur le scénario surprise de cette journée spéciale.
Alors que le magasin est ouvert et que tout se passe normalement à l’intérieur, une troupe fait soudain irruption. Armé de guirlandes et accompagné par l’accordéoniste Giuseppe Santoro, le groupe serpente alors au milieu des rayons tout en entamant la chansonnette. Des amis, des « habitués du lieu » et des employés forment une farandole, sous les yeux amusés des clients. Ce n’est pas un hasard si c’est ce type d’hommage qui a été choisi. « J’ai toujours trouvé géniales les vidéos où l’on voit des gens commencer à chanter et à danser dans des magasins. Je me suis toujours dit que ce serait sympa de le faire une fois. Et ça arrive pour mon dernier jour », lance Françoise, submergée par l’émotion.
Une vraie épicerie de quartier
Si la Vallonnière apprécie tant cet hommage, c’est sans doute qu’elle a toujours voulu que son Denner soit un lieu de vie avant d’être un lieu de commissions. Son mari Joseph partageait totalement sa vision. L’homme de 66 ans est d’origine sicilienne et ce n’est pas pour rien que le magasin avait de sérieux airs de petite épicerie italienne de quartier. « Nous voulions une ambiance décontractée et familiale pour être au plus près de nos clients », abonde-t-il alors que le bouchon de Mauler vient de sauter. Leur petit plaisir supplémentaire arrivait chaque dimanche matin. Le magasin ouvrait de 8 heures à midi et « comme l’atmosphère était encore plus relax que d’habitude, on prenait le temps de boire un café ‹ en coulisses › avec certains habitués. »
« C’était les mains et j’étais la tête »
Oh, bien sûr, le travail n’était pas toujours facile. Les horaires, les heures en position debout à cumuler. Et tout ça à répéter sept jours par semaine. « Mais c’était mon rêve de tenir un magasin et je suis heureuse de l’avoir fait avec mon mari. » Un mari qui avait travaillé durant 35 ans « chez Bourquin » avant de faire son entrée dans les rayons. Et travailler en couple, même pas peur : « C’était les mains et j’étais la tête », résume-t-elle dans un large sourire. Joseph aimait par-dessus tout se fournir en produits italiens de qualité. Ses origines lui permettant d’avoir de bons filons. Le soin qu’il prenait à sélectionner ses fruits et ses légumes était à l’image de l’implication sans faille du couple. Françoise reconnaît d’ailleurs qu’elle aura beaucoup de peine à avoir la tête à autre chose dans l’immédiat.
Livraisons pendant le Covid
« Je ne peux pas me passer d’ici, je ne peux pas me passer de cette ambiance et de mes clients », lâche-t-elle les yeux remplis de larmes mais heureuse. Son mari avoue, lui aussi, qu’il aura du mal à passer à autre chose mais « que c’était le moment de le faire. Il faut qu’on puisse profiter un peu maintenant. On l’a mérité, cela fait des années que nous ne sommes plus partis en vacances par exemple. Je suis content que ce soit un jeune qui nous succède. »
Ce jeune s’appelle Naser Mohammd, il a été choisi par Denner et il vient du Valais (il s’installera évidemment au Val-de-Travers). Il était présent, mercredi, lors de ce moment de fête.
L’avenir nous dira s’il sera un acteur aussi investi que le couple Bellassai qui est allé jusqu’à livrer ses clients dans tout le Vallon, et jusqu’aux Ponts, pendant le Covid. Dans ce film, les nombreux gestes de reconnaissances qu’ils ont reçus de leurs clients feront allègrement office d’Oscars. Félicitations !
Kevin Vaucher