LaMal – Principe de la territorialité
X…, née en 1974, est assurée auprès de CSS Assurance-maladie SA pour l’assurance obligatoire des soins et a adhéré à la forme d’assurance particulière « Cabinets de santé » impliquant un choix limité du fournisseur de prestations. Elle est suivie par les services spécialisés de l’Hôpital B…, dans le contexte d’une dysphorie de genre (réassignation du genre masculin vers le genre féminin).
Sans en avoir préalablement informé sa caisse-maladie, X… s’est soumise à une intervention tendant à la féminisation faciale à la clinique D…, à Marseille, effectuée par le Dr E…, le 10 juillet 2018.
À la demande des médecins suisses de l’assurée (correspondance des 12 février, 22 juin 2018 et 18 janvier 2019), la caisse-maladie a accepté de prendre en charge les frais d’une épilation définitive du visage au laser, d’une mammoplastie et d’une vaginoplastie en Suisse. En revanche, saisie par le Dr C… de l’Hôpital B… le 3 mai 2018, elle refusa, par décision du 27 février 2019, de prendre en charge en Suisse les frais d’une septorhinoplastie de féminisation et d’une génioplastie.
Le 8 juillet 2019, X… a informé sa caisse-maladie de l’intervention effectuée à Marseille par le Dr E… en joignant les rapports et la facture de cette dernière, d’un montant de 15’905 euros. En se fondant sur l’avis de son médecin-conseil, la caisse a réformé la décision du 27 février 2019 en précisant que le coût de l’intervention du médecin marseillais n’était pas à la charge de l’assurance obligatoire des soins (décision du 28 novembre 2019).
Saisie par X…, la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal compétent a rejeté son recours et confirmé la décision sur opposition de la caisse-maladie par arrêt du 19 janvier 2021.
Contre cet arrêt, l’assurée a formé un recours de droit public auprès du Tribunal fédéral en demandant que la décision sur l’opposition du 28 novembre 2019 soit annulée et en concluant à la prise en charge par la caisse-maladie des frais d’intervention du Dr E… ainsi que de ses frais d’hébergement à Marseille pour la période du 12 au 17 juillet 2018.
Dans un arrêt du 10 décembre 2021, le Tribunal fédéral (ci-après TF) a considéré ce qui suit :
Liminairement il y a lieu de retenir que le jugement cantonal entrepris expose de façon exhaustive les dispositions légales et la jurisprudence à appliquer pour qu’un traitement médical effectué à l’étranger puisse être pris en charge par l’assurance obligatoire des soins (art. 34 LAMal et 36 OAMal). À teneur de ces dispositions, une exception au principe de la territorialité ne peut être admise que s’il n’existe en Suisse aucune possibilité de traitement de la maladie ou que s’il est établi que, dans un cas particulier, une mesure thérapeutique pratiquée en Suisse comporte pour le patient des risques importants et notablement plus élevés par rapport à une alternative de traitement à l’étranger. La notion de raisons médicales doit être interprétée de façon restrictive.
En l’occurrence l’intervention du Dr E… n’intervenait pas dans une situation d’urgence au sens de l’art. 36 al. 2 OAMal. L’assurée s’était rendue en France pour se faire opérer sans avoir attendu la décision de la caisse-maladie ensuite de la demande faite par le Dr C…. Par ailleurs, en première instance, la recourante avait principalement fait valoir un élément de confort. D’autre part, en Suisse, aucun médecin n’avait préconisé une frontoplastie. Enfin, la septorhinoplastie et la génioplastie de féminisation sont pratiquées en Suisse en chirurgie esthétique.
Dans son recours au TF, X… a également fait valoir une violation de son droit à des débats publics au sens de l’art. 6 par. 1 CEDH. Pour des raisons de procédure, cet élément a été considéré comme irrecevable.
Considérant ce qui précède, le Tribunal fédéral a rejeté le recours de X… et a mis les frais à sa charge. (ATF 9C_136/2021)
Blaise Galland, avocat