Une tirelire communale «participative»
Le Val-de-Travers est une région où la vie associative, sportive et culturelle est abondante. De nombreuses salles, notamment communales, et des terrains permettent d’entretenir un tissu social vivifiant. Mais dans le même temps, la commune de Val-de-Travers fait face à des déficits chroniques année après année. Alors pourquoi pas tirer parti de la première réalité pour soigner la seconde et surtout comment ? Les autorités politiques ont répondu à cette question par la création d’une sorte de tirelire communale participative. Jackpot ?
Il n’y a pas eu de miracle divin le 1er décembre dernier lorsque le Conseil communal a annoncé le budget 2023 de la commune de Val-de-Travers. Le poste du déficit affichait plus de 2 millions et celui des charges 71.5 millions. Il fallait agir. Et c’est exactement ce qui a été demandé aux cinq chefs de dicastères. Pour celui du territoire, des sports et de la culture, c’est à Eric Sivignon que revenait la responsabilité de proposer des mesures d’économies et de frein au déficit. « Une grosse pression de la commission de gestion des finances et de la commission budgétaire a été mise afin de se diriger vers une amélioration au niveau des comptes de la commune », décrit-il.
La fin d’une « exception vallonnière »
À la suite des nombreuses discussions qui ont entouré ce dossier, la question des subventions aux sociétés locales a rapidement été mise sur la table. « On a constaté qu’elles bénéficiaient d’une subvention totale sur la location des salles et des terrains communaux. Et en regardant un peu autour de nous, on a constaté que la majorité des autres communes neuchâteloises étaient clairement moins généreuses que nous dans ce domaine. Au Val-de-Ruz, les sociétés locales ont uniquement droit au moitié prix par exemple. »
Un prix fixe plutôt qu’un pourcentage
Val-de-Travers a choisi de ne pas copier cette logique de faire payer un pourcentage du prix de la salle pour une raison d’équité. « Des sociétés réservent parfois une salle plus grande – et plus chère – que celle dont elles ont besoin car les autres sont occupées. Il nous semblait injuste qu’elles supportent ce surcoût dont elles n’y sont pour rien. » C’est là que le principe des cinq francs par réservation a tiré son épingle du jeu au milieu des autres propositions. « Avec ce système, peu importe la taille des salles, c’est une participation aux frais qui est fixe et identique pour tout le monde. Et ça reste quatre à six fois moins cher que ce qui se fait ailleurs. »
Les terrains de foot aussi !
Les frais liés à ces salles se composent de la logistique de réservation, de la conciergerie, du chauffage et de l’électricité notamment. « Tous ces frais étaient couverts à 100% par la commune, en plus des frais de location de la salle ou du terrain. » Les terrains de foot communaux, comme ceux de Fleurier, de Couvet et d’espaceVal (où joue Kosova NE) sont aussi concernés. Il s’agit de 5 francs par réservation et non pas par heure de réservation. Prenons un exemple concret. Si deux équipes du FC Fleurier ont des entraînements qui se suivent le mardi soir, de 18 h à 20 h puis de 20 h à 22 h, il vaudra mieux prendre un bloc de réservation de 18 h à 22 h (coût : 5 francs) que deux blocs de réservation distincts qui coûteraient alors dix francs.
« Une mesure proportionnée »
« Par ailleurs, ce sera aussi un moyen de lutter contre les réservations qui ne sont pas honorées. On a eu des cas où des salles ont été réservées mais pas utilisées. Alors qu’il y avait d’autres utilisateurs qui souhaitaient louer ces salles. Et certaines fois, ils l’avaient un peu de travers parce qu’ils passaient devant et ils voyaient qu’elles étaient inoccupées. » Lier les frais aux réservations permet théoriquement de limiter ce genre de problèmes. Reste que les autorités politiques n’ont pas pris cette décision avec grand bonheur. « On ne le fait pas de gaieté de cœr mais on se doit de trouver des solutions pour le budget communal. Et il nous semble que c’est une mesure proportionnée. »
Les petits paieront peu, les grands beaucoup
L’impact de cette mesure, introduite en début d’année, dépendra du nombre de réservations de chaque société. « Pour certains, cela représentera un coût annuel non négligeable, il ne faut pas se le cacher. Mais d’un autre côté, comme le nombre de réservations est lié au nombre d’adhérents, il y a une logique de proportionnalité. » Comprenez que « les petits » paieront peu et que « les grands » (avec plus de moyens) débourseront davantage. Dans quelle mesure chaque société répercutera ces coûts sur les cotisations de ses membres, cela reste à voir au cas par cas.
20’000 à 50’000 francs au fond de la tirelire ?
Beaucoup de jeunes, et même des moins jeunes, ont une tirelire de pièces de un, deux ou cinq francs à la maison. Dans ce cas, c’est un peu comme si la commune introduisait une tirelire participative de pièces de 5 francs et chaque société devra participer au pot commun. En fin d’année, combien le Conseil communal espère voir au fond de la tirelire ? « C’est compliqué à dire car c’est la première année qu’on lance ce système de participation aux frais. Mais en revanche, je peux vous dire qu’il y a généralement entre 4000 et 10’000 réservations par année. » Une simple multiplication par 5 et on obtient le magot potentiel : 20’000 à 50’000 francs. Une raison de plus de se réjouir de la vivifiante vie associative, sportive et culturelle ?
Kevin Vaucher