Tour du Monde
À bord du légendaire El Chepe
Deux anciens Vallonniers et amis, Fabienne Pétremand de Fleurier et Pierre Antoniotti de Saint-Sulpice, ont décidé de faire un projet en commun et hors du commun : celui de voyager, toujours plus loin, toujours plus longtemps. C’est le 4 novembre dernier qu’ils ont décollé de Genève pour atteindre le nord du Mexique. Un premier souhait collectif : celui de descendre toute l’Amérique latine jusqu’en Patagonie pour ensuite regagner l’Europe et le Portugal afin de réaliser le trajet ferroviaire le plus long au monde : Porto-Hô Chi Minh. La route est encore longue, électrique, mystérieuse, majestueuse et l’aventure ne fait que commencer ! à découvrir dans le Courrier à raison d’une fois par mois. Bon voyage !
24 heures avant le jour « J », on pose nos valises à El Fuerte qui, comme plusieurs autres municipalités de la région, a été élu « Pueblo magico » (village magique) et semble comme suspendu dans le temps. Héritages des temps lointains, ses importantes bâtisses comme le fort, le Palacio Municipal ainsi que la Parroquia del Sagrado Corazon de Jésus, le plus grand édifice religieux de la cité, nous invitent à imaginer la vie dʼautrefois.
Après une grosse heure dʼattente sur le quai, nous entendons enfin le sifflement de la majestueuse locomotive du El Chepe, train classé dans le top 10 mondial, faire danser les premiers rayons matinaux. On nous attribue rapidement des places confortables mais, cʼest debout entre deux voitures, là où les fenêtres restent ouvertes, que nous sommes déterminés à passer le voyage.
Le convoi démarre lentement, serpente entre prairies et hameaux avant de débuter son ascension en pente douce. Puis très vite, les paysages changent et deviennent spectaculaires. Le train sʼengouffre à vitesse panoramique dans dʼétroits canyons et traverse des tunnels et des ponts vertigineux à travers deux États mexicains. Après six heures de rêvasseries ferroviaires, nous nous arrêtons à Bahuichivo, petit village à flan de colline, et passons le reste de la journée à observer la vie locale. Le dernier tronçon sera pour demain.
Après une seconde journée à bord du El Chepe, cʼest sous une lune polaire que nous arrivons à Creel, une petite bourgade de 5000 âmes perchée à 2330 m dʼaltitude. Creel pourrait ressembler à un quartier décentré dʼUlan Bator en Mongolie, avec ses toits de tôles aux tuyaux qui crachent du vieux charbon et à ses bandes de gosses qui errent dans le noir. La rue principale par contre, bordée de boutiques et de restaurants chauffés et faits tout de bois, ferait presque penser à une station de ski helvétique. Presque oui, car on est bien au Mexique et ça se voit à chaque coin de rue.
Nous consacrons la journée du lendemain à explorer les environs. Nous découvrons tout dʼabord un paysage aux nuances occidentales, composé de vastes plaines encombrées par une multitude de masses rocheuses, de pins, de chênes et de cultures aux teintes beiges, cramées par lʼastre solaire. Puis notre chemin passe par une jolie mission abandonnée, plantée au milieu des terres sableuses. On photographie les enfants, on croise des femmes aux habits colorés issues de la communauté Raramuri qui arpentent les rues et les campagnes en vendant leur artisanat, avant de déboucher sur le lac Arareco qui semble avoir été abandonné par Dieu lui-même.
Après 48 heures à Creel, départ pour la ville de Chihuahua et retour sur la capitale et ses quelque 20 millions dʼhabitants. La descente du continent peut commencer.
Pierre et Fabienne
En bref
Long de 637 km, le chemin de fer Chihuahua-Pacifique passe sur 37 ponts, dans 86 tunnels et atteint jusqu’à 2438 m d’altitude.
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