Le Vallonnier qui protège le pape (2 sur 2) !
L’unique résident neuchâtelois de la Garde suisse pontificale est Vallonnier ! Mathieu Conrath a prêté serment le 6 mai dernier au Vatican. Guidé par la foi et l’envie d’agir pour les autres, le Verrisan de 23 ans se dit prêt à faire le sacrifice ultime pour le Saint-Père. Cet engagement, ce militaire de l’armée suisse se dit également prêt à le faire pour n’importe quel compatriote le jour où il sera de retour sur le sol helvétique. Du pape François, qu’il côtoie, il en rend une image attendrie d’un homme humble, attentionné et souvent souriant. Des caractéristiques que je retrouve rapidement chez Mathieu Conrath. Le jeune homme profite de cette expérience unique tout en gardant constamment une pensée et un lien indéfectible avec le Val-de-Travers. Comment ses proches ont-ils réagi à son dévouement total pour le Saint-Père ?
Dans la première partie de ce portrait, Mathieu Conrath vous a notamment expliqué les raisons profondes de son engagement. Si cela semblait évident à ses yeux, l’a-t-il été tout autant pour son entourage ?
C’était mitigé. Tout le monde a été très surpris par ma décision. Ma famille étant catholique pratiquante, elle savait que je ne partais pas n’importe où et que cette expérience pouvait être enrichissante pour moi. Mes amis ont été plus dans le flou. Pour eux, c’était une idée originale mais ils ne comprenaient pas forcément sa finalité. Malgré tout, l’adjectif ʼ exceptionnel ʻ est souvent revenu dans les discussions pour qualifier mon projet.
Ce qui est exceptionnel, c’est notamment d’être aussi proche de celui qui incarne l’autorité absolue du catholicisme sur terre. Alors, comment se passe la cohabitation au Vatican ?
La solennité du serment, l’honneur du moment
Le pape François a reçu tous les nouveaux gardes avant notre assermentation. Sinon, j’ai déjà eu l’occasion de lui serrer la main et de parler quelques mots avec lui. J’en garde le souvenir d’un homme très humble, attentionné et souvent souriant.
La cérémonie d’assermentation s’est tenue le 6 mai dernier, en hommage à un fait d’armes de la Garde suisse. C’est le 6 mai 1527 que l’épisode dit du « sac de Rome » s’était déroulé. 147 gardes suisses sont morts ce jour-là pour défendre la vie du pape en place (Clément VII).
Lors de cette cérémonie, chaque garde est appelé à tour de rôle pour prêter serment. Lorsque ce fut mon tour, j’ai levé la main droite en écartant les trois premiers doigts, en partant du pouce. Puis, j’ai agrippé le drapeau de la Garde suisse de la main gauche pour prêter serment. Le drapeau comporte la croix suisse (comme tous les drapeaux des mercenaires suisses) et différentes armoiries dont celles du pape fondateur de la Garde suisse Jules II (1506). Je remercie ma famille d’avoir fait le déplacement, c’était fort !
Pour la petite histoire, l’un des uniformes les plus célèbres du monde est taillé sur mesure pour chaque nouvelle « recrue ».
Libre accès à la « supérette du Vatican »
Lorsqu’on le porte, on se doit d’être exemplaire car on est observé en permanence par les touristes.
Le Verrisan et ses frères d’armes ont plusieurs missions à remplir : protéger le Saint-Père, garder les frontières du Vatican, effectuer le service d’honneur (lors de réception de chefs d’État ou d’ambassadeurs), accompagner le pape lors de ses voyages et protéger les cardinaux lors des conclaves.
Notre service est organisé sur la base de 6 jours de travail et 3 jours de réserve. J’ai également deux ou trois cours d’italien par semaine pour mieux appréhender la langue. Je peux travailler de jour comme de nuit, le matin comme l’après-midi, tout change en permanence.
Heureusement, les gardes suisses sont réactifs car leur caserne se trouve au Vatican, à gauche de l’entrée Sainte-Anne.
C’est l’une des entrées principales. Nous logeons en chambre de 2 à 4 personnes et nous avons accès à une salle de fitness et une salle de théorie. Nous sommes libres de nos mouvements, par exemple pour aller au supermarché du Vatican.
Le Vatican s’ouvre aux Vallonniers et aux Vallonnières
Les gardes suisses obtiennent la nationalité du Vatican le temps de leur engagement. Ils ont droit de se déplacer où ils veulent en Italie quand ils ne sont pas en service.
J’ai également droit à 4 semaines de vacances par année. Nous dînons au réfectoire de la caserne et si nous voulons aussi y souper, nous devons nous inscrire pour le repas du soir. C’est très encadré. Je peux accueillir des gens pour leur faire visiter mon univers et je peux aussi passer du temps avec eux à Rome. À ce propos, si des Vallonniers sont intéressés par ce monde hors du temps, je leur fais volontiers visiter mon lieu de vie s’ils passent dans le coin.
Prévenez simplement de votre arrivée, pour ne pas passer sous l’épée ou la hallebarde de Mathieu Conrath.
Nous avons aussi des armes à feu mais nous les utilisons en cas d’absolue nécessité,
(r)assure-t-il. Sans blaguer, est-il prêt à aller au sacrifice ultime pour le pape François ?
Oui. Il est explicitement mentionné que cette mission peut englober cet acte dans le contrat que j’ai signé. Je serais aussi prêt à ce sacrifice pour n’importe quel habitant de la Suisse. Cela fait partie des devoirs d’un militaire.
Le pape François peut dormir sur ses deux oreilles, le Vallon veille sur lui !
Kevin Vaucher