Jean-Pierre Cattin
Un homme à découvert
De prime abord, on ne sait pas de quel côté ouvrir la discussion avec Jean-Pierre Cattin. C’est peu dire que le Vallonnier de 64 ans a eu une vie bien remplie jusqu’ici. Une vie durant laquelle il a pris soin de ne jamais trop sortir des rangs, préférant toujours rester en position de retrait. Pourtant, il en a fait des choses et il en a vu du pays. Et on ne dit pas seulement cela en référence à ses 23 ans de carrière en tant que facteur…
« À mon époque, chaque facteur avait sa tournée et il ne la changeait pas au cours de sa carrière », pose Jean-Pierre Cattin en préambule. Comprenez par là que ce n’est plus forcément le cas maintenant et que cela ne réjouit pas forcément celui qui a pris sa retraite en 2020. « Mais je ne vais pas parler de La Poste maintenant. Ma femme me l’interdit habituellement parce que j’ai tendance à m’emporter », rigole-t-il.
43 ans à La Poste
On peut aisément le comprendre. Après 43 ans passés au sein de La Poste, forcément, on s’y attache. Promis, on évite les sujets qui fâchent Jean-Pierre. Mais pouvez-vous nous dire quel a été votre parcours au sein de l’entreprise ? « J’ai débuté comme facteur en 1977. Puis, j’ai transité par les offices postaux de Buttes, de La Côte-aux-Fées et de Saint-Aubin-Sauges avant de revenir sur le Val-de-Travers. » Il a rendu sa blouse jaune aux Verrières où il était responsable. « J’en ai vécu des changements et des évolutions durant ces 43 ans. Je garde surtout les liens que j’ai su tisser avec les gens d’ici. » Le bilan professionnel est plutôt pas mal pour quelqu’un qui projetait de gagner son pain comme… boulanger pâtissier. « Cela se résume finalement à mes trois années d’apprentissage dans ce domaine. »
Jamais assis à la même place
En politique aussi, l’homme a multiplié les expériences. Conseiller communal de Couvet, conseiller général de Val-de-Travers, ancien président du Parti socialiste vallonnier ou encore député suppléant au Grand Conseil neuchâtelois (entre 2009 et 2013). « J’ai dû suppléer quatre collègues socialistes au gré de leurs absences. Comme ils étaient très entreprenants, j’ai souvent dû les remplacer dans la salle du château. C’est tellement vrai que les autres députés pensaient que j’étais un élu comme eux. Bon, ils comprenaient juste pas pourquoi je n’étais jamais assis à la même place durant les séances puisque je m’asseyais à quatre places différentes en fonction du collègue que je remplaçais », plaisante-t-il.
Aux yeux de tous
Derrière sa bonhomie se cache en réalité un homme qui aime la discrétion et qui la cultive même. « Je ne suis pas quelqu’un qui prend spontanément des initiatives. Par contre, je réponds toujours présent quand on me demande de faire quelque chose. » Récemment encore, il a acquiescé lorsque son parti lui a proposé de reprendre un poste de questeur au Conseil général. « Je suis un peu mort de traque à chaque fois car je suis dans une position très en vue, face aux membres du Conseil général et au public. » Cette fois, même ses grandes lunettes, que je soupçonne d’avoir choisies pour mieux se réfugier derrière elles, ne lui suffisent pas à se dissimuler aux yeux des autres.
Jean-Pierre et ses huit frères et sœurs
« Je n’ai jamais été à l’aise à me mettre en avant. » Jean-Pierre était donc bien heureux de pouvoir rester à l’ombre de ses huit frères et sœurs, durant son enfance. C’est probablement cet environnement qui lui a aussi permis de faire grandir son besoin de s’investir pour les autres. En plus de tout le reste, il est aujourd’hui membre du comité de Val’Action et responsable de la « maison de colonies de vacances de Champ-Petit ». Des engagements 100% bénévoles. La bâtisse de Champ-Petit a été construite en 1846 et elle a notamment accueilli des enfants tuberculeux en vacances. Elle continue à faire le plaisir de colonies de vacances, d’anniversaires ou de fêtes de famille. Mais on bavarde beaucoup et il est temps de refermer cet échange. On ne savait pas par quel bout commencer et on sait encore moins quelle porte choisir. Celle de derrière, c’est plus discret, nous dirait-il certainement…
Kevin Vaucher
La « vieille dame » de Champ-Petit
Soucieux de donner de sa personne bénévolement là où il le pouvait, Jean-Pierre Cattin met un pied dans la « maison de colonies de vacances » de Champ-Petit en 2004. Il donne d’abord quelques coups de main avant de gagner en responsabilités. « Il y a eu plusieurs démissions au sein de l’équipe et, moi, je n’avais finalement plus personne à qui donner la mienne alors je suis resté », s’amuse-t-il. Située à 959 mètres d’altitude, au-dessus de Couvet, cette maison est isolée et en pleine nature. « Le chauffage se fait au poêle à bois et à pellets. Pour l’eau, on récupère l’eau naturelle (pluie, fonte de neige, drainage…) et on la filtre via un néon ultraviolet pour la désinfecter. » Même si les locations fonctionnent bien depuis cinq ans, ce n’est de loin pas un business. « L’argent des locations est intégralement utilisé pour payer les charges et les réparations. » Voilà 20 ans que Jean-Pierre Cattin s’en occupe et il ne serait pas contre de passer la clef un prochain jour. « Mais seulement à une personne qui aime le coin et qui en prendra soin. » Vous, peut-être ?