Marcel Jaccard
Des mains en or et des pieds en feu !
Marcel Jaccard aura 86 ans le 17 juillet. Selon l’expression consacrée, on peut dire que sa vie est derrière lui. Pourtant, le Vallonnier a toujours pris les devants depuis qu’il est né. Nombreux sont les éloges à dire de lui qu’il est une personne en or, prête à « rattraper » ceux qui chutent. Sportivement aussi, il a toujours cherché à être devant pour porter « le collectif » dans des périples aussi incroyables que la Route 66 (4200 km) et Paris-Gao-Dakar (6600 km) en course à pied.
Lorsqu’il nous reçoit, Marcel Jaccard rayonne presque autant que le jaune fluo éclatant de son t-shirt du Swiss canyon trail. Que ce soit en tant que coureur ou bénévole, il a participé a pratiquement toutes les 30 éditions de l’événement vallonnier : « J’ai même fait office de vélo-balai une année. Je me rappelle que j’étais derrière un coureur parisien retraité qui marchait plus qu’il ne courait. Il s’excusait presque d’avancer si lentement. Je lui ai dit de prendre tout son temps et de profiter des paysages », lance d’entrée l’homme en or et aux pieds… en feu !
Pas d’union sportive mais… 64 ans de mariage quand même
Si on dit de lui qu’il a les pieds en feu, c’est qu’il n’arrête jamais de courir. Enfin presque. S’il a dû mettre un coup de frein à la course à pied à l’âge de 65 ans, en raison d’une opération à un pied, Marcel continue à se nourrir de 1200 km annuels en deux-roues. « Le gène sportif est familial. Je l’ai hérité de mes parents ainsi que de mon oncle. Par contre, mon épouse Marylise était dans une dynamique totalement différente. Elle n’aime pas trop ça. » Cela n’empêche pas pour autant le duo de faire vie commune depuis 64 ans !
Des aventures de plus en plus extraordinaires
Marcel, c’est un peu l’équivalent masculin de ce qu’est la collection Martine (à la plage, en vacances,…). Sauf qu’avec lui, chaque aventure revêt un caractère extraordinaire. Le premier volume pourrait s’appeler « Marcel fait le tour du lac de Neuchâtel en 24 heures ». Oui mais il l’a fait deux fois et dans chaque sens. « Pourquoi choisir ? », réagit-il d’un air léger. Mais le best-seller de cette série reste indiscutablement Paris-Gao-Dakar. « Cette course de 6600 kilomètres se faisait en relais par équipe. Nous avions une sacrée dream team, constituée principalement de Vallonniers comme Philippe Sandoz, Blaise Huguelet, Thierry Jeannet et Jacques Müller. »
Une expédition qui fait « datte »
Dans ce format, il n’y avait ni GPS, ni natel. L’orientation se faisait principalement à la boussole. « À peine étions-nous entrés dans le désert qu’une tempête de sable avait éclaté. Je me rappelle également que nous devions impérativement dépenser tous nos francs CFA avant de sortir d’Algérie. Comme il nous restait 1200 francs, nous avons acheté plusieurs caisses de dattes pour en distribuer aux enfants. »
On ne se refait pas… Parmi les autres moments forts, Marcel se souvient d’une fondue dégustée sous 30 degrés, « accompagnée d’une bonne bouteille de Mauler », ajoute-t-il.
Retour au bercail en fanfare
Moins drôle – mais tout aussi pétillant – : « Je devais parfois prendre des relais de nuit, à 3 heures du matin. Ce n’était pas triste ! » La dream team du Vallon avait finalement terminé sur le podium (3e) et avait été accueillie quasiment comme des « héros de la Nati » – au retour d’une coupe du monde ou d’un Euro – avec comité d’accueil, fanfare et buffet à leur descente du train à Neuchâtel. Des mains en or, des pieds en feu et des souvenirs plein la tête, désormais déposés sur papier.
Kevin Vaucher
De Chicago à Los Angeles en deux semaines
Autre périple marquant dans le parcours de Marcel Jaccard : la course en relais de 12 coureurs sur la Route 66. Soit 4200 bornes à avaler en l’espace de deux semaines. « Les conditions étaient si dantesques – avec des cols de plus de 3000 mètres à franchir – que le directeur de course avait hésité à arrêter les sept équipages. Je lui ai dit que c’était un enfant de cœur et qu’il devait nous laisser continuer. » Ce qui fut chose faite. Mais pas pour le directeur de course qui avait été écroué deux jours en prison pour avoir autorisé la montée du Grand Canyon sans autorisation. Rassurez-vous, après un jour de pause à… Las Vegas, tout le monde était reparti en direction de la Vallée de la mort et ses… 48 degrés !