Un joyau qui se décarcasse !
Le meilleur lutteur neuchâtelois est Vallonnier. Plus personne n’arrête Kilian Colò sur les ronds de sciure. Le jeune homme de 23 ans s’apprête à disputer la prestigieuse Fête fédérale, du 26 au 28 août, à Pratteln (Bâle). Ce sera le seul représentant cantonal en lice. Il y a trois ans, il avait été éliminé le premier jour de la joute fédérale, après quatre passes. L’objectif est de faire mieux cette année en se qualifiant pour la seconde journée de compétition. Celui qui exerce la profession de boucher a gagné, en tranchant depuis 2019, de quoi accrocher plusieurs couronnes romandes ou cantonales autour du cou. Portrait d’une montagne de talent qui se décarcasse pour des couronnes !
La lutte, Kilian Colò ne l’a pas vraiment choisie, c’est elle qui s’est imposée dans sa vie. Son oncle et son papa faisaient déjà valoir leurs muscles à leur époque.
À son âge, Kilian a déjà fait beaucoup plus que nous,
reconnaissent-ils avec fierté. Le « petit Colò » n’a pas surclassé que les membres de sa famille, il s’est aussi imposé comme le fer de lance de la lutte neuchâteloise. Au Val-de-Travers, c’est devenu un exemple à suivre pour les plus jeunes. Lui, c’est à 7 ans qu’il a commencé cette discipline de « solides ».
Mon ami d’enfance, Vincent Erb, est le fils de l’entraîneur du club du Vallon. Donc toutes les routes se dirigeaient vers un même point d’arrivée : la lutte.
Ce point de chute n’était, en fait, que le début d’un nouveau chemin.
Plus de 80 palmes en catégorie juniors
Le lutteur en devenir a pris le temps d’apprendre et de franchir les écueils les uns après les autres. Au bout de son chemin chez les juniors, Kilian avait glané quelque 80 palmes. Par cinq fois, il a remporté la Fête romande. Et les compétitions cantonales ?
Je ne sais pas exactement combien j’en ai remportées, peut-être une dizaine.
En clair, suffisamment pour ne plus avoir à les compter. Ses objectifs sont ailleurs, très loin de la scène neuchâteloise sur laquelle il a tant fait parler de lui. Kilian Colò fait partie du top 10 romand et il ne s’interdit pas d’aller bousculer ses adversaires suisses allemands. Ses larges épaules ont de quoi en faire tomber plus d’un. L’impact peut être vif et sec mais « toujours dans le respect de l’autre lutteur », promet-il.
Le fair-play et la camaraderie sont des choses qui comptent. C’est un sport individuel, oui, mais on ne peut pas lutter contre les murs. On a besoin d’adversaires pour s’entraîner et pour concourir.
Chef de troupeau plutôt que mouton
Pour le moment, Kilian Colò a déjà décroché neuf couronnes romandes ou cantonales. Cette année, il est reparti avec elles trois fois. Une belle moisson ! Elles ont trouvé une place sur son mur,
juste à côté des cloches que j’ai gagnées dans ma jeunesse.
Dans ce sport, il y a aussi parfois des veaux à (r)emporter. Le Saint-Sulpisan a obtenu cette récompense cinq fois. Mais il a préféré repartir en empochant leur valeur marchande (500 à 800 francs environ) plutôt que de trouver un coin de verdure à Saint-Sulpice pour les faire paître. Quoique le boucher qu’il est aurait peut-être opté pour une autre solution… Mais revenons à nos moutons. Le lutteur serait plutôt chef de troupeau que simple mouton d’ailleurs. Il donne régulièrement des entraînements aux plus jeunes du club.
Si je peux les aider, je le fais avec plaisir. La relève est capitale pour la survie de la lutte.
Il n’oublie pas de transpirer, lui aussi, grâce à sa coach physique Océane Evard.
J’ai deux séances par semaine avec elle. Et j’en ai deux à trois autres spécifiques à la lutte.
« J’ai encore trop l’état d’esprit romand »
Il se rend fréquemment à Kerzers pour affronter des combattants d’un très bon niveau.
C’est en s’entraînant avec meilleur que soi qu’on devient meilleur. Les Suisses allemands sont les rois de ce sport. J’essaie de m’en inspirer mais j’ai encore trop l’état d’esprit romand.
Apprendre à combattre sans complexe est quelque chose qui se travaille. Bingo, Kilian Colò est un travailleur. Ça se sent dans ses mots et ça se voit dans ses mains.
Je pense que je consacre un peu plus de temps à la lutte que la majorité des Romands qui font cette activité.
Cette régularité lui permet de faire partie des 27 athlètes romands sélectionnés pour la Fête fédérale de lutte. Son niveau qui lui permet même de toucher du doigt certains records.
Si j’arrive à battre le record neuchâtelois de couronnes je serai vraiment super content. Edouard Stähli a pris sa retraite quand il en avait quarante.
L’appétit d’un boucher, l’ambition d’un champion !
Kevin Vaucher