Le 19e siècle s’est installé à Travers
Les Américains avaient mis 50 ans pour conquérir lʼOuest au 19e siècle. Delphine Vantieghem nʼa eu besoin que de dix années pour y retourner. Le Far West, les cow-boys, tout ça, cʼétait pas trop son truc. Pour replonger dans lʼépoque, la jeune femme a préféré acheter une maison à Travers et la transformer dans un style collant à cette période. Des années dʼacharnement et dʼastuces lʼont peu à peu transportée dans le passé.
Delphine Vantieghem a des origines belges mais cʼest à Areuse quʼelle a grandi. Après quoi elle a mis le cap sur lʼouest ! Direction Genève où elle a vécu sept ans. Jusquʼà ce que lʼenvie de « reconquête » de sa région ne la gagne.
Cʼest plutôt la verdure et le calme de la campagne qui me manquaient,
tempère-t-elle.
Je voulais acheter une maison et je suis tombée sur cette baraque un peu mal foutue à prix abordable,
glisse-t-elle dans une moquerie bon enfant. Cʼest surtout que lʼagencement se prêtait plutôt mal à un lieu de vie.
En bas, il y avait deux cuisines mais aucune salle de bains et beaucoup de portes avaient été condamnées.
Retour dans le passé onéreux
Et cʼétait guère mieux en haut où un vieux galetas peu accueillant et un toit totalement à refaire lʼattendaient.
Jʼai vite compris quʼil allait falloir sortir les outils pour remettre tout ça au goût du jour ou plutôt au goût de lʼépoque.
Malgré cette prise de conscience immédiate, elle était loin de sʼimaginer quʼelle allait investir autant dans ce retour au style 19e siècle que dans lʼachat de la maison elle-même (480ʼ000 francs environ). Ce quʼelle ne savait pas non plus, cʼest quʼelle logerait sa meilleure amie en bas (80m2) et ses parents au dernier étage (113m2).
Cʼest quand jʼai refait lʼisolation du toit que jʼai vu tout le potentiel de cet espace qui comprend aussi une mezzanine. Comme mes parents approchaient de la retraite, cela tombait à pic.
Une maison de 1859
Elle, cʼest lʼétage « du milieu » dont elle a pris possession. Cent-vingt mètres carrés à réaménager intégralement.
Je savais que jʼallais prendre le temps de bien faire les choses car lʼidée est de pouvoir vivre dans ma maison jusquʼà ma mort. Jʼai donc investi dans des matériaux de qualité, notamment pour la cuisine où jʼai utilisé du granit noir du Zimbabwe. La maison date de 1859, jʼai voulu jouer sur le contraste entre les éléments anciens et ces rénovations aux finitions plus nobles.
Lorsquʼelle est tombée sur des pièces qui avaient été refaites, Delphine Vantieghem a poussé le curseur jusquʼà revenir à un style plus ancien avant dʼy apporter ses touches du 19e siècle.
Entre surprises et mystères
Son petit « plaisir coupable » est de faire tomber ses invités dans le panneau.
Prenez le bureau par exemple…
Je vois que le style est différent par rapport au reste de la maison, ce doit être une pièce gardée dans son jus.
Pas du tout ! Mais vous me faites super plaisir de me dire ça car ça prouve que jʼai réussi mon coup. Tout a été refait. Mais je voulais faire quelque chose de très authentique, un peu comme un vieux décor de théâtre très sombre. En fait, cʼest du contre-plaqué de chez Jumbo. Ils me connaissent bien là-bas,
plaisante-t-elle, fière de son coup. Même les livres dʼépoque collent avec lʼambiance.
Ce ne sont pas des livres mais des classeurs.
Et encore un trompe-lʼœil, un ! Dans lʼunivers que Delphine sʼest matérialisé autour dʼelle, tout a une histoire et tout est propice à vous surprendre. Jʼaperçois quelque chose dʼanormal sur un mur, je pose ma main dessus et hop… une trappe sʼouvre soudainement.
Bravo, vous avez découvert lʼune des caches de la maison.
Sauvée du plomb par ses chats
Pas de cadavre à lʼintérieur, cʼest déjà rassurant.
Cʼest arrivé à un ami qui faisait des travaux chez lui. ça doit surprendre.
Ah vraiment ? Si peu ! Pour rester dans le thème, sachez que durant ses travaux, la propriétaire a probablement été sauvée par ses chats.
Un jour, je me suis rendu compte quʼils nʼallaient pas bien. Comme ça coïncidait avec un décapage thermique que jʼétais en train de faire, jʼai fait analyser la chambre. Et il sʼest avéré que cʼétait de la peinture au plomb.
Heureusement, cʼest la seule mauvaise surprise du genre sur laquelle elle est tombée.
La maison est trop vieille pour que je tombe sur de lʼamiante.
Au salon, je tombe quant à moi sur une porte murée à côté dʼune autre porte non murée. Un autre « piège » ?
Bientôt ouvert aux visites ?
Cʼest un peu bête mais dans mes standards décoratifs, jʼaime la symétrie. Jʼai donc fait ajouter cette fausse porte uniquement pour le plaisir de mes yeux. Et de ce côté, jʼai retiré la porte centrale qui était mal alignée pour en créer deux autres sur les côtés.
Elle est allée jusquʼà Tarbes pour dégoter lʼune des quatre portes du salon.
Pour les meubles, jʼaime le vrai et le brut très 19e siècle. Jʼaime ce style alors je me déplace souvent très loin.
Quitte parfois à ruser pour allier lʼesthétique au pratique. Ainsi, le lit dʼépoque était trop court et il a dû être scié pour y souder une pièce pour le rallonger. Même si cela lui a coûté quelques bobos de temps en temps durant ces dix ans, Delphine a tout fait par elle-même. Aujourdʼhui, elle arrive au bout de cette transformation. Seules la salle de bains et quelques finitions sont à prévoir avant peut-être dʼouvrir son intérieur aux visites.
Cʼest un projet à lʼétude, je vous en tiendrai informé.
Et vous, prêts pour la conquête de lʼouest à Travers ?
Kevin Vaucher