La sage-femme née pour le sport
Mélanie Jeannerod a un parcours sportif hors des sentiers battus. Le sport nʼétait pas dans les gènes familiaux mais elle a toujours été « au-dessus » dans toutes les disciplines dʼendurance. Comme si la sage-femme, qui exerce de façon indépendante, était née pour le sport. Aujourdʼhui, elle passe de la course et du vélo lʼété au ski de fond et au ski-alpinisme lʼhiver avec une facilité désarmante. En juillet, cʼest sur les routes du Tour de France cycliste quʼon la retrouvera.
Mélanie Jeannerod a 37 ans et la cylindrée dʼun « bolide sportif » qui en a facilement dix de moins. Il faut dire que le sport se pratique en famille chez les Jeannerod, son mari Yvan est lui aussi un grand amateur du genre.
On pratique un peu les mêmes sports mais depuis que nous avons eu notre fille il y a bientôt cinq ans, cʼest devenu rare quʼon puisse sʼentraîner ensemble.
Quand mari et femme « volent » le sport de lʼautre
Yvan est charpentier et il travaille donc selon des horaires « normaux ». Mélanie est sage-femme indépendante, ce qui lui permet davantage de flexibilité au quotidien.
Généralement, jʼessaie de me dégager du temps dans la journée pour lʼentraînement. Comme ça, je peux être à la maison en fin dʼaprès-midi pour mʼoccuper de la petite.
Cʼest seulement quand le week-end arrive que toute la famille peut partir vadrouiller ensemble la plupart du temps. La mère de famille a un profil de coureuse alors que son homme est plutôt taillé pour le vélo. Chacun a naturellement initié lʼautre à son dada et ils ont mordu simultanément.
On peut même dire que je fais plus de vélo que lui maintenant et quʼil court plus souvent que moi, on a échangé les rôles.
Horaires irréguliers et nuits
Mélanie est dʼorigine française et ça fait une dizaine dʼannées quʼelle sʼest expatriée en Suisse. Dʼabord au Vallon puis à Fribourg avant de revenir par ici en 2016.
Jʼen ai alors profité pour lancer mon activité indépendante. Avant cela, jʼai fait ma formation de sage-femme en France et jʼai travaillé durant six ans dans plusieurs hôpitaux. Jʼai connu les horaires irréguliers et les nuits de boulot mais jʼai continué à mʼentraîner relativement normalement. Jʼai appris à faire du volume quand la situation professionnelle se détendait pour rattraper les éventuelles séances manquées. Ça mʼest toujours utile aujourdʼhui quand je prépare de gros objectifs et quʼil faut jongler avec le travail.
Comme ses horaires changent très vite et très souvent, elle doit être réactive et ne pas trop sʼéloigner pour faire du sport.
« Elle adore courir avec maman »
Cela peut être perçu comme des contraintes mais je me satisfait totalement de ces conditions car je déteste la routine.
Avec les années, la sage-femme a appris à écouter son corps et elle a accepté dʼen faire moins durant les périodes chargées.
Par la force des choses, la naissance de ma fille mʼa obligée à mʼadapter à cette nouvelle vie.
Et la petite sʼest elle aussi parfaitement adaptée à ses parents apparemment :
Elle aime bien venir courir avec maman de temps en temps et elle adore nager aussi.
Une future triathlète pour étoffer encore un peu les ressources sportives de la famille Jeannerod ?
Elle fera ce quʼelle veut,
avance sagement sa maman.
« Lʼaccouchement » de la médecine
Sa jeunesse à elle a toujours rimé avec le mot « sport » bien que ce gène nʼétait pas le plus présent dans sa famille.
Jʼai toujours aimé bouger, mʼaérer, aller à lʼécole en vélo et ce genre de trucs,
dit-elle. De nature solitaire, Mélanie sʼest logiquement dirigée vers des sports dʼendurance où elle se confrontait à elle-même. Ce sont ses profs de gym qui ont repéré en premier ses qualités pour les efforts dʼendurance.
Ils mʼont poussée à rejoindre un club dʼathlétisme juste « pour voir ».
Et elle a vu !
Jʼétais assez bonne partout et ça a confirmé mon intérêt pour la course à pied.
Alors que tout le monde imaginait quʼelle allait vouloir faire du sport son métier et quʼelle deviendrait prof dʼEPS, elle a accouché dʼune autre vocation : la médecine.
La mécanicienne Jeannerod
Jʼai commencé des études en médecine mais jʼai malgré tout continué le sport pour le plaisir.
La fin de son cursus estudiantin lʼa repoussée vers des objectifs sportifs plus élevés. Ce quʼelle adore par-dessus tout, ce sont les challenges. Et il faudrait plus sûrement dire la préparation de ces challenges.
Jʼaime la notion de dépassement de soi. Jʼaime chercher à pousser un peu plus loin le curseur à chaque fois. Jʼaime aussi chercher à identifier les points sur lesquels je peux travailler pour mʼaméliorer.
Un peu comme un mécanicien chercherait les meilleurs réglages possibles à lʼinstant T, Mélanie Jeannerod cherche constamment à avoir « la machine » la plus efficiente possible.
« Je pense que cʼest inné »
Au fil des ans et au gré de ses rencontres aussi, notamment avec son mari Yvan, la coureuse a multiplié les résultats dans plusieurs disciplines : vélo, ski de fond, ski-alpinisme etc.
Petite, jʼai directement obtenu de bons résultats sans forcément mʼentraîner plus que les autres, je pense que cʼest inné,
révèle la sage-femme. Il y a probablement une part dʼinné mais il y a assurément aucun hasard dans les performances de la Fleurisane.
Comme il nʼy a pas de hasard non plus si elle a été sélectionnée pour participer à une étape du Tour de France le 10 juillet prochain. Non pas avec le peloton mais lors de la traditionnelle journée qui permet à des cyclistes non professionnels de goûter au parcours de la grande boucle.
Ce sera une étape de montagne entre Briançon et lʼAlpe dʼHuez (170 km, 4700 mètres de dénivelé positif). Ce sera un gros morceau, je ne peux pas y aller la fleur au fusil. Du coup, jʼai maintenu des séances sur home-trainer durant cet hiver pour garder la forme à vélo.
Retirer la soupape
En plus de cet entraînement spécifique, les nombreuses courses de ski de fond et de ski-alpinisme disputées ces dernières semaines seront également bénéfiques.
Jʼai fait quelques tests pour voir à quel niveau je me situais en cyclisme et a priori je suis plutôt du côté des bonnes coureuses.
Lʼinverse aurait été étonnant pour celle qui disputera aussi la patrouille des glaciers cette année. Autant dʼobjectifs sur lesquels elle pourra partir « plein pot ».
Après ma grossesse on mʼa découvert une maladie chronique mais mon état sʼest stabilisé depuis lʼannée passée. Je suis contente de pouvoir enfin retirer la soupape,
bouillit la sage-femme qui materne déjà ses prochaines victoires !
Kevin Vaucher