Dans la course avec Sandrine Chauvy
Soutenue, elle a couru et elle a vaincu !
Il y a quelques semaines, nous vous avons présenté Sandrine Chauvy. Cette Fleurisane est une coureuse non voyante qui est accompagnée par des guides dans ses différents périples. Début juin, elle a participé pour la première fois à une course de plus de trente kilomètres lors du Swiss Canyon Trail. Pour lʼoccasion, elle était épaulée par son guide habituel (Alain Pointet) et par trois membres de lʼassociation OUTʼCHA. Ces « accomplisseurs de rêves » lui permettront de vivre le mythique Sierre-Zinal en août prochain.
Cʼétait sympa mais je dois avouer que jʼai terminé la course passablement fracassée.
Avec ses mots et sa spontanéité, Sandrine Chauvy résume bien le sentiment qui était le sien au terme des 31 kilomètres du Swiss Canyon Trail (1440 mètres de dénivelé positif). De prime abord, la sportive semble encore bien éprouvée plusieurs jours plus tard
Je pense que jʼai atteint mon mur, ma limite. Je ne vais probablement pas allonger davantage la distance sur mes futures compétitions. Cʼest principalement la grosse fatigue mentale que jʼai ressentie lors de la phase de récupération qui me pousse à dire ça. Cʼest typiquement dans ces instants que je me rends compte à quel point courir en étant aveugle demande de la concentration. Mes sens sont en éveil permanent et cʼest fatigant sur 8 heures de course.
De sympathiques barjos
Huit heures cʼétait pour lʼobjectif. En réalité, Sandrine et ses guides ont accompli leur virée commune en 7 h 16.
Je ne mʼattendais pas à exploser pareillement le compteur,
sʼétonne la Vallonnière.
Avant le Swiss Canyon Trail, je nʼavais jamais couru plus de 27 bornes, même à lʼentraînement. Je regarde maintenant vers Sierre-Zinal avec plus de confiance même si je crains le gros dénivelé qui nous attend (2200 mètres à grimper).
tout est possible à celle qui croit. Dʼautres sportives aveugles lʼont démontré avant elle, comme la Bernoise Chantal Cavin (5 participations à des ironmans). Sur les pentes valaisannes, Sandrine pourra compter sur les quatre membres de lʼassociation OUTʼCHA (Out of Challenge).
Ce sont des barjos de sport mais des barjos sympas,
glisse-t-elle tendrement.
Les accomplisseurs de rêves entrent en action
En fait, cette association est née dʼune amitié entre trois amis (rejoints ensuite par leur complice Michaela Senft). Hervé Acosta, Patrick Sumi et Victor Hugo Docarmo ont eu une révélation en pleine course dans le désert.
On sʼest dit quʼon pourrait aller plus loin que nos propres challenges sportifs et quʼil serait bien de faire des choses utiles pour les autres en même temps. Du coup, sur notre compétition suivante, on a récolté 11ʼ000 francs pour lʼassociation dʼAdolf Ogi. De là est arrivé le projet de notre propre association favorisant lʼinclusion sociale par le sport,
résume Hervé. Cʼest en participant à lʼHumani, Trail des Diablerets en tant que coureurs-balai quʼils ont fait la connaissance de Sandrine.
Dans la discussion que jʼai eue avec Patrick, je lui ai notamment dit que je rêvais de participer à Sierre-Zinal. Mais que cʼétait un peu trop pour le faire avec un seul guide.
Cette révélation nʼétait pas tombée dans lʼoreille de nʼimporte qui. Les « accomplisseurs de rêves » allaient pouvoir entrer en action.
Le Swiss Canyon Trail pour « faire connaissance »
Patrick Sumi a aussitôt fait remonter lʼinformation à ses amis dʼOUTʼCHA et ils ont appelé Sandrine Chauvy quelques jours plus tard pour lui dire quʼils allaient la soutenir dans ce projet. Grâce à leurs sponsors, ils ont offert à la coureuse une aide matérielle et ils prendront en charge ses frais dʼhôtel et de participation à la course le 16 août prochain. Ils joueront aussi le rôle de guide à cette occasion. Cʼest dans cette optique quʼils sont venus courir le Swiss Canyon Trail avec leur nouvelle protégée et son guide « attitré » Alain Pointet.
En plus dʼAlain, nous étions trois de lʼassociation pour guider Sandrine. Nous avons dʼabord observé comment il fonctionnait avec elle et quels « ordres » il lui donnait pour lʼorienter. Puis on a pris des relais. Cʼétait quitte ou double pour nous, soit ça passait soit ça cassait,
raconte Hervé.
Avec les félicitations de Patrick Christinat
Et cʼest passé ! La confiance sʼest rapidement imposée entre les différents membres du quintette. Ils ont tous fait lʼintégralité de la course avec Sandrine en occupant la fonction de guide tour à tour. Grâce à son expérience, Alain a pu les conseiller pour gérer au mieux lʼavancée de la sportive non voyante.
Cʼétait parfois compliqué, je suis passée par beaucoup dʼémotions. Par une petite crise de nerfs aussi. Mais ils ont su me remotiver pour aller au bout. Sur la ligne dʼarrivée, chacun y est allé de sa petite larme et lʼorganisateur Patrick Christinat est venu me féliciter. Je me réjouis de remettre ça,
conclut Sandrine. Sans doute rêvera-t-elle de la « longuuue » montée vers Chandolin jusquʼau départ de Sierre-Zinal.
Kevin Vaucher