Commentaire
Des violences qui interrogent
Le match du jeudi 21 septembre entre le FC Couvet et le FC Fleurier n’a pas pu aller à son terme. Alors que l’égalisation venait de tomber (89e), une agression a eu lieu sur le terrain à la remise en jeu suivante. Celle-ci a vite dégénéré en cohue généralisée. Une fois un semblant de calme revenu (en réalité, les esprits se sont encore échauffés près des vestiaires), l’arbitre a justement décidé de mettre un terme prématuré à la confrontation.
Cette affaire intervient peu de temps après l’agression d’un arbitre sur un autre terrain du canton. Ce sont les parents d’un joueur de juniors D qui auraient alors franchi la ligne rouge. Jeudi soir, l’association neuchâteloise de football avait justement prévu une action afin de sensibiliser sur la violence dans le foot amateur. Problème : un joueur covasson a quelque peu brouillé le message envoyé, en se faisant l’auteur de violence sur un adversaire, lors du derby covasso-fleurisan. Un tel acte ne doit pas avoir sa place sur un terrain de foot.
Un cas de plus de violence ordinaire
Aujourd’hui, nous choisissons d’en parler dans cet article compte tenu de ce contexte particulier. Cette violence ordinaire se constate chaque week-end dans les ligues de foot amateur, partout en Suisse. C’est le problème global qu’il faut dénoncer et tenter d’éradiquer. Attention toutefois à ne pas tomber dans l’autre extrême qui serait de considérer que l’ensemble du monde du foot est pourri par les dérapages violents. Cela n’est pas le cas. Pour s’en convaincre, il suffit de se pencher sur quelques chiffres fournis par l’Office fédéral du sport en 2022.
Tous pourris ? C’est plus compliqué que ça…
Ils nous apprennent que chaque week-end, ce sont quelque 10’000 matches de football qui sont joués dans notre pays, opposant plus de 1300 clubs, soit plus de 270’000 joueurs licenciés (dont 9% de femmes et 63% de juniors). Sans excuser la violence, cela permet de replacer le phénomène sur sa gigantesque échelle de calcul. Un état des lieux du phénomène de la violence dans le foot amateur a notamment été dressé par Marika Romanens dans un article, publié sur le site du CFJM, portant sur la période 2011 – 2021.
Une explosion des cartons bien réelle
Sur l’ensemble de la saison 2010/11, 3941 cartons jaunes et 225 cartons rouges avaient été sortis sur les terrains de foot amateur vaudois. Dix ans plus tard, les arbitres avaient vu jaune 12’218 fois (plus de 300% d’augmentation) et rouge à 586 reprises (plus de 250% de hausse). En plus de la nature toujours plus violente des cartons (insultes, coups de poing,…), le reportage pointe sensiblement du doigt les matches des juniors. Il y a quelques années, un enfant qui écopait d’un carton rouge était réprimandé par ses parents. Aujourd’hui, persuadés d’avoir enfanté la prochaine star du ballon rond, certains parents ont tendance à excuser son geste et à cristalliser leur colère en direction de l’arbitre. Que faire à la vue de ce constat ? Est-ce au foot d’éduquer les parents… heu les enfants romands ?
Kevin Vaucher