Un village, un téléski, une âme !
Blaise Cand, trente et un an dans la société du téléski des Verrières dont dix à la présidence. Jean-Louis Jornod, bénévole lui aussi mais depuis 1966. Cʼest son papa Gilbert, aidé par quelques amis, qui avait lancé la première installation dans les années 1950. Autant de personnalités sans qui lʼun des derniers lieux de vie du village aurait disparu depuis longtemps. Cette petite structure tient une grande place dans le cœur des habitants. Cʼest une des âmes des Verrières.
Si le comité de la société du téléski du village nʼest composé que de cinq personnes, ils sont beaucoup plus à intervenir régulièrement et bénévolement pour quʼil continue à tourner encore et encore depuis si longtemps. Jean-Louis Jornod se souvient :
Je skiais déjà sur le premier téléski. Il y avait une simple cabane et la remontée mécanique était vraiment très artisanale. Il y avait un vieux moteur VW, une grosse corde et un système de poulie accroché à un arbre à la lisière de la forêt. Jʼavais sept ans et je me rappelle quʼon sʼaccrochait comme on pouvait à cette corde pour être tracté jusquʼen haut.
Le tout, en priant pour que ça ne lâche pas en route.
Verbier, Veysonnaz, Verrières, même combat !
Cette installation de fortune, déjà appréciée, avait heureusement laissé place à quelque chose de plus élaboré en 1966. Jean-Louis avait dʼailleurs participé à son installation.
Celui-là était digne de ce nom et il a bénéficié de lʼéclairage pratiquement dès le début. Il a tourné jusquʼen 1990.
Jusquʼà ce que le couperet tombe : lʼinstallation devait être modernisée.
Il faut savoir que notre structure des Verrières est soumise aux mêmes normes et contrôles que celles de Verbier et Veysonnaz par exemple. LʼOffice fédéral des transports fait un test technique tous les deux ans et une inspection du câble tous les six ans,
plante le président Blaise Cand.
Brouettes de béton tractées
La grande force des Verrières est la participation régulière des villageois aux travaux de leur téléski.
En deux ou trois coups de fil, on est une petite quinzaine prêts à se retrousser les manches. Cʼest ce qui nous a permis de changer le câble très rapidement en 2016 par exemple.
Cʼest aussi grâce à cette entraide verrisanne que le téléski a pu être changé en 1990/1991.
Celui qui est actuellement en service est donc le troisième. Cʼétait un ancien téléski de la Robella et on lʼa racheté pour lui donner une seconde vie. On en a passé des samedis après-midi à faire couler du béton pour les nouveaux socles et ainsi de suite. On se servait du câble du téléski précédent pour monter des brouettes de béton
, se souviennent dans la bonne humeur les deux hommes.
De 50 à 0 ouvertures
Grâce à des maçons, à des électriciens ou encore à des charpentiers volontaires, tout était prêt fin 1991 pour les premiers flocons. Mais ceux-ci sont arrivés seulement au mois de février 1992 cette année-là. Si le montage de lʼinstallation se fait toujours en novembre et que le démontage se fait en général en mars, le nombre de jours dʼactivité est très aléatoire.
Il est impossible de faire des prévisions. Cela peut aller de cinquante mises en service par année à aucune. Et contrairement aux croyances, la tendance nʼest pas à la baisse.
Ainsi, il y a eu trois hivers sans ouverture de téléski dans les années 1980 et la saison 2005/06 a débouché sur un bon score de quarante mises en service. Lʼannée passée, il y en a eu une trentaine du 31 décembre au 28 janvier et après plus rien. Ce qui est déjà mieux que la moyenne des quinze dernières années qui est dʼenviron vingt-cinq.
De la voiture au téléski
Cette saison, on a commencé en fanfare avec huit ouvertures début décembre et puis le soufflé est retombé malheureusement.
Beaucoup de villageois et de Vallonniers sʼy déplacent lorsque lʼenneigement est suffisant. Il y a aussi des gens de Sainte-Croix et quelques Français.
Un bon après-midi (mercredi, samedi ou dimanche), il peut y avoir de 40 à 60 personnes. Les soirées du mercredi et du vendredi (avec raclette à la buvette) sont très appréciées aussi.
Lʼattractivité du téléski des Verrières vient également de son parking au pied des pistes.
Vous sortez de la voiture, vous pouvez mettre les skis directement et vous partez sur le téléski. Cʼest simple.
La buvette « genevoise »
Et même si les finances sont saines, nʼoubliez quand même pas de passer par la caisse.
La subvention de la commune et notre petite soixantaine de membres, qui paient une cotisation annuelle de trente francs, nous permettent de faire face aux frais fixes. Ce qui nʼempêche pas dʼêtre ingénieux pour faire des économies.
Dans les années 1980, la construction de la buvette en est lʼillustration la plus cocasse.
Nous avons entendu dire que des baraquements de chantiers étaient démolis vers Carouge. On sʼest donc renseigné puis on est allé les récupérer un samedi avec une vingtaine de camions. Une moitié a servi à bâtir la buvette du stade de foot des Verrières et lʼautre a été construite ici pour le téléski.
Ingéniosité, débrouillardise, engagement et beaucoup de bénévolat, voilà comment la station des Verrières cultive son charme face aux plus grandes installations depuis la nuit des temps et sans vague à lʼâme.
Kevin Vaucher
