2008 : le Vallon se met en marche
Certains ne le savent peut-être pas ou l’ont oublié mais la Marche du 1er mars a longtemps suivi un seul tracé historique. Celui qui va du Locle jusqu’au château de Neuchâtel. Logique me direz-vous puisque c’est de la Mère-Commune qu’est venu le coup de départ de la révolution. C’est seulement en 2008 que les « révolutionnaires » ont vu double en instaurant un deuxième départ depuis Couvet. Retour en arrière sur cette riche année 2008 pour le Val-de-Travers.
Nous sommes le soir du 28 février. Le canton de Neuchâtel est une principauté détenue par un monarque puissant mais lointain, le roi de Prusse. Après la tentative de révolution ratée de 1831, le temps est à la révolte. Par provocation, des républicains hissent un drapeau suisse devant l’hôtel de la Fleur-de-Lys au Locle. Une altercation s’ensuit avec les gendarmes. Les républicains tiennent bon et obtiennent même l’abdication du commandement militaire de la ville. Vous connaissez tous la suite de l’histoire et cette fameuse Marche sur Neuchâtel qui aboutira à la Révolution républicaine neuchâteloise.
Avant 2008, une seule trace depuis le Locle
C’est donc tout naturellement depuis Le Locle que la Marche du 1er mars a vu le jour en 1984. Du coup, durant de longues années, les marcheurs du Val-de-Travers devaient se rendre au Locle ou sur un lieu de passage de la marche pour entrer dans la peau de révolutionnaires d’un jour. Si on y ajoute ceux qui prenaient le peloton en cours de
route, pour avoir moins de chemin à
faire, cela faisait grossir à vue d’œil la lignée de marcheurs entre Le Locle et
Neuchâtel.
Ainsi, en 1998, on relevait « 300 courageux à affronter les bourrasques qui balayaient Le Locle. »
En 1998, des chars de vin blanc en renfort
à 6 h 30, ils se sont mis en action pour rejoindre La Chaux-de-Fonds où un bon millier de personnes supplémentaires les attendaient à la place de la Carmagnole. Le Courrier du 5 mars 1998 précise « que des chars bien approvisionnés en thé et en vin blanc » accompagnaient la colonne. Au ravitaillement de La Vue-des-Alpes, de nouveaux « volontaires » ont fait grandir les rangs. Puis, rebelote à Valangin. « Si bien qu’ils n’étaient pas loin de 4000 à arriver sur la place des Halles. » Place où d’autres Neuchâtelois avaient déjà pris place.
1314 kilos de fondue servis
Une fondue géante avait été organisée dans le parking de la place Pury et 5500 convives y ont finalement participé. Plus d’une tonne de fromage avait été servie (1314 kilos, très exactement, un record). Le chant du 150e anniversaire de la Révolution avait été entonné par 150 enfants du canton. 150 jeunes musiciens avaient joué une version instrumentale de « J’ai rêvé ». Et une certaine Ruth Dreifuss y était notamment allé de son discours. ça place immédiatement son époque !
Un nouveau parcours depuis Couvet
Dix ans plus tard, lors du 160e anniversaire de cet événement fondateur neuchâtelois, les organisateurs de la marche ont souhaité élargir le spectre pour rassembler. Par souci de converger plus concrètement vers une commémoration plus cantonale, neuchâteloise et républicaine, un nouveau parcours a été mis sur pied depuis le Val-de-Travers. « L’offre des itinéraires s’élargit mais la tradition demeure », pouvait-on apprécier dans le Courrier du 28 février 2008. « La marche est possible sans inscription mais il faudra dans ce cas vous munir de votre sandwich », pouvait-on encore déguster.
Le succès au rendez-vous
Dans l’édition suivante, la journaliste Claire-Lise Frossard n’y allait pas par quatre chemins : « Première Marche du 1er mars depuis le Vallon, quel succès ! » Le départ fut donné à 9 h 30 et le château de Neuchâtel s’était offert aux marcheurs aux alentours de 15 h 30, après 27 kilomètres d’efforts. Les organisateurs espéraient 50 à 100 participants. Il y a eu 300 inscrits et finalement 200 partants. Devant la pluie et le vent, une centaine de Vallonniers avaient préféré rester au chaud.
En 2008 : petite révolution au Val-de-Travers
Il faut dire que les gens du Val-de-Travers avaient plusieurs choses à fêter. Les 160 ans de la République, bien entendu. Mais aussi le troisième anniversaire de la libéralisation de l’absinthe ainsi que le vote sur la fusion des neuf communes, acceptée quelques jours plus tôt (le 24 février). La veille de cette journée du 1er mars, la fanfare môtisanne « L’Harmonie » avait joué la « retraite » dans les rues de Boveresse et Môtiers avant de servir un grand souper pour donner des forces aux marcheurs du lendemain. Au menu, c’était les tripes ! Ce n’est pas précisé mais on espère au moins que c’était des tripes, façon neuchâteloise…
Kevin Vaucher